Omnivore - Olivier Bocquet

Résumé : Un criminel est-il une célébrité comme les autres ? Avril 2016. Plus de quatre millions de Français assistent à la diffusion en direct de l’émission culinaire La Surprise du chef. Ils y découvrent, horrifiés, que le jeune chef étoilé Karl Angus propose de la viande humaine dans son restaurant. Arrêté le soir même, il parvient à s’échapper lors de son transfert au tribunal. Là encore sous l'œil des caméras. Les capitaines William Toulouze et Rachel Kuklinski doivent rapidement le retrouver s’ils ne veulent pas que la police de Fontainebleau devienne la risée des médias. Mais quand Rita Chandler, la présentatrice de l’émission, disparaît, l’affaire prend une nouvelle tournure. Karl Angus n’a pas dit son dernier mot. Et il compte bien revenir sur le devant de la scène pour partager avec le plus grand nombre ses recettes de cuisine…

MASSE CRITIQUE BABELIOTHRILLERCOUP DE CŒUR

Antiigone

10/9/20252 min read

"Omnivore", le nouveau roman d'Olivier Bocquet aux éditions du Seuil.
"Omnivore", le nouveau roman d'Olivier Bocquet aux éditions du Seuil.

J’ai rarement lu un polar qui m’a autant donné envie… de fermer la porte de ma cuisine à double tour.

Avec « Omnivore », Olivier Bocquet signe un roman à la fois haletant, terrifiant et délicieusement satirique, qui se lit comme on regarde une émission de télé-réalité un peu trash : les yeux écarquillés, entre fascination et dégoût. Une belle découverte permise par Babelio et sa Masse Critique !

Dès les premières pages, le lecteur est happé par ce pitch aussi improbable que glaçant : un chef étoilé qui sert de la chair humaine sous l’œil des caméras.

Et à partir de là, impossible de lâcher l’affaire. L’auteur joue avec nos nerfs en alternant les points de vue, pour nous plonger dans une spirale où la célébrité se nourrit littéralement de chair et de sang. Journalistes avides de scoop, enquêteurs dépassés, proches désemparés ne sont pas prêts à ce qui les attend.

Les personnages sont particulièrement réussis : Karl Angus, charismatique et monstrueux à la fois, est un méchant comme on les aime, à la fois fascinant et insupportable. Face à lui, les capitaines Toulouze et Kuklinski se débattent avec autant de rigueur policière que de fragilités humaines, ce qui les rend terriblement attachants. Quant à Rita Chandler, la présentatrice embarquée malgré elle dans cette macabre farce, elle incarne à merveille la frontière poreuse entre spectacle et tragédie.

La plume d’Olivier Bocquet est vive, tendue, toujours sur le fil. J’ai ressenti derrière chaque scène son expérience de scénariste : le rythme est digne d’un bon thriller télévisé, les dialogues claquent, et la tension ne redescend jamais. Fontainebleau, loin de son image de paisible cité forestière, devient le théâtre d’une chasse à l’homme médiatisée, où chaque geste est amplifié par la caméra et scruté par des millions de spectateurs.

Ce roman n’est pas seulement un polar diablement efficace : c’est aussi une réflexion grinçante sur notre époque, où la célébrité, même criminelle, se consomme et se partage comme un menu du jour. Olivier Bocquet questionne notre rapport au spectaculaire, à la violence, et à ce que nous sommes prêts à avaler, au sens figuré comme au sens littéral.

En refermant ce livre, on se sent un peu coupable d’avoir autant apprécié un récit aussi dérangeant. Mais n’est-ce pas le propre des grandes fictions noires ? « Omnivore » se dévore (sans mauvais jeu de mots… ou peut-être que si) en un week-end, et laisse longtemps son arrière-goût inquiétant. À lire absolument pour les amateurs de polars qui aiment quand ça mord, gratte et interroge.

Je tiens à remercier Babelio et les éditions du Seuil pour leur envoi et leur confiance.