Gadienne des baies - Pauline Guillerm
Résumé : Ana est à la recherche de son père qui n’a plus donné signe de vie depuis plusieurs jours. Lors de ses sorties nocturnes et après avoir crié dans la nuit à en perdre le souffle, elle rencontre une biche en lisière de forêt, au bord de la baie des anges, celle de son enfance qu’il a fallu quitter précipitamment et qu’elle redécouvre peu à peu. Les souvenirs jaillissent : les brumes de chaleur et l’odeur de la mort finissent par chasser les inhibitions, comme dans un sursaut archaïque, presque animal. Alors qu’elle est en pleine répétition d’un prochain concert avec Sam, son ami d’enfance qui l’aime depuis toujours, elle essaie de comprendre, avec Sol, les étranges circonstances de la disparition de leur père…
MASSE CRITIQUE BABELIO
Antiigone
10/6/20252 min read


Voici mon avis sur « Gardienne des baies », de Pauline Guillerm, une quête lumineuse dans une forme déroutante, lu dans le cadre d’une Masse Critique de Babelio. La lecture de ce court texte m’a laissée dans un état d’entre-deux : à la fois séduite par la force des images et déstabilisée par la forme choisie. Pauline Guillerm construit son récit comme une matière hybride : dialogues de théâtre, fragments poétiques, éclats de prose. Ce mélange, qui pourrait créer une dynamique originale, m’a plutôt désorientée. J’avais parfois l’impression d’assister à une pièce sans décor, sans didascalies, où les voix se succèdent mais sans cadre clair pour les situer.
Un petit mot sur Pauline Guillerm. Autrice, comédienne et metteuse en scène française, elle est née vers la fin des années 1970. Elle est diplômée d’une Licence professionnelle d’encadrement de pratiques théâtrales et d’un Master de création littéraire.
Ses pièces, publiées chez Lansman, explorent les thèmes de la jeunesse, des trajectoires singulières et du lien aux Territoires avec un grand T ! Elle mène aussi de nombreuses résidences, ateliers, et projets collectifs, souvent en lien avec des lieux spécifiques ou des réalités sociales, ce qui nourrit son écriture in situ.
Mais revenons à nos moutons. Enfin, plutôt à notre biche, puisqu’il en est question dès le début du roman. Le sujet est fort : la disparition d’un père et la quête d’Ana, fille marquée par une enfance douloureuse. La figure paternelle absente, presque fantomatique, laisse affleurer un passé de violences, évoqué avec pudeur mais ressenti avec intensité. Certains passages, notamment ceux où Ana crie dans la nuit et rencontre une biche à la lisière de la forêt, sont portés par une dimension symbolique et sensorielle qui frappe l’imagination. J’ai trouvé dans ces instants une vraie puissance archaïque, comme si l’écriture cherchait à rejoindre un langage primitif, viscéral.
Cependant, cette richesse poétique est aussi ce qui m’a tenue à distance. Le texte, parfois trop elliptique, laisse le lecteur combler de grands vides. Entre souvenirs, réminiscences et conversations qui surgissent sans transition, il m’a manqué une charpente narrative plus lisible pour m’y accrocher. J’ai bien compris le fil principal – une femme devenue adulte, qui revient sur son passé et sur l’ombre pesante de son père – mais j’ai souvent eu l’impression que le sens m’échappait, ou que je lisais une partition incomplète.
Pour conclure, « Gardienne des baies » oscille entre poésie sauvage et expérimentation théâtrale. On y trouve une vraie intensité, une sensibilité brute qui peut toucher, mais aussi un flou formel qui risque de désarçonner plus qu’il n’envoûte. C’est un texte qui mérite sans doute une deuxième lecture, peut-être à voix haute, pour mieux en saisir la musicalité et accepter qu’il ne livre pas tout, qu’il fonctionne davantage comme une impression que comme un récit linéaire.
Je tiens à remercier Babelio et les éditions Lansman pour leur envoi et leur confiance.