Dognapping - Stéphane Poirier

Résumé : « Elle leur avait dit que c’était risqué. Pas du grand banditisme, mais de la vraie prise d’otage. Josef et Hans n’avaient pas tout de suite compris, et l’idée de séquestrer Josie la souillon les avait rebutés. Si bien qu’ils avaient été soulagés d’apprendre que Betty parlait du chien de Josie. » Hans, Betty et Josef sont trois perdants magnifiques vivant dans un village de montagne. Chacun à la poursuite de ses rêves, ces trois amis d’infortune sont prêts à en découdre avec la vie, quitte à franchir la frontière de la légalité. Escrocs à la petite semaine, ils se lancent dans le rapt du chien d’une notable de la région contre une demande de rançon. Mais les choses tournent mal et la manne financière espérée se fait désirer. Dans la tradition du roman social à l’humour noir, les trois acolytes nous entraînent dans une équipée sauvage teintée de tendresse et de solidarité. Un récit dans l’air du temps qui se joue de l’espoir et du désespoir, sans se départir de la soif de trouver sa place dans un monde en mutation.

BLACKLEPHANT ÉDITIONSROMAN CONTEMPORAIN

Antiigone

7/10/20253 min read

"Dognapping", le roman de Stéphane Poirier, aux éditions Blackléphant.
"Dognapping", le roman de Stéphane Poirier, aux éditions Blackléphant.

Bonjour tout le monde !

Aujourd'hui, je te parle d'une histoire qui a du chien ! 🐶

Avec « Dognapping », paru aux éditions Blackléphant, Stéphane Poirier signe un roman à la fois drôle, émouvant et profondément humain. Sous ce titre intrigant et presque facétieux se cache un récit d’une grande délicatesse, qui dépasse largement le simple fait divers. Il est moins question ici d’un enlèvement canin que d’une errance existentielle menée par trois personnages cabossés de la vie, unis par un plan aussi absurde que touchant. Ce roman offre une parenthèse tendre et lucide sur les invisibles, ceux qui, dans l’ombre, cherchent encore à exister.

L’histoire débute dans un petit village de montagne indéfini, en déclin, où trois amis d’âge mûr — Hans, Betty et Josef — vivent chacun à leur manière une forme de déroute personnelle. Lassés de survivre au jour le jour, ils se lancent dans un projet improbable : kidnapper le chien d’une riche notable du coin afin de toucher une rançon. Ce point de départ, qui pourrait faire penser à une comédie burlesque, n’est qu’un prétexte pour explorer des trajectoires humaines en perdition. L’enlèvement du canidé devient le fil conducteur d’un roman qui ne cesse de surprendre par sa profondeur.

Hans, ancien éditeur reclus dans une maison en ruine, Betty, autrice en mal de reconnaissance et en plein désarroi amoureux, et Josef, personnage fragile et alcoolique, tentent de reprendre le contrôle sur leur vie par ce geste absurde. Alternant les points de vue, le récit plonge au cœur de leurs pensées, de leurs espoirs silencieux et de leurs blessures enfouies. Chacun porte en lui un rêve inabouti, une douleur discrète, une solitude sourde. Et c’est justement cette sincérité qui rend ces personnages si attachants. On les suit, non pas pour leur réussite, mais pour leur humanité. Ils sont imparfaits, maladroits, parfois lâches ou perdus, mais ils sont vrais.

Ce qui m’a frappée dans cette histoire, c’est aussi la justesse avec laquelle l’auteur aborde des thèmes universels. L’amitié, la solidarité, la quête de sens, le besoin d’être vu dans un monde qui vous ignore, tout cela affleure sans jamais tomber dans le pathos. Le roman agit comme une loupe sur des vies minuscules, mais pleines de richesses intérieures. C’est un livre sur l’échec, oui, mais surtout sur la possibilité de se relever, d’être utile, de bâtir quelque chose ensemble, même à travers une initiative aussi bancale qu’un rapt de chien.

En refermant roman, j’ai ressenti un étrange mélange de mélancolie et de chaleur. Il y a dans « Dognapping » cette lucidité douce que l’on retrouve dans les meilleurs romans sociaux : un regard acéré sur la réalité, mais sans jamais se départir d’une immense compassion. Stéphane Poirier signe ici un texte sensible, accessible, qui touche droit au cœur.

Stéphane Poirier excelle dans l’art de capter les micro-émotions. Son écriture, tantôt poétique, tantôt familière, navigue avec fluidité entre introspection et dialogues. Il y a une douce ironie dans son regard, une tendresse pudique pour ces « perdants magnifiques » qui refusent de s’effacer complètement. L’humour n’est jamais forcé, il surgit avec légèreté, souvent dans le décalage entre leurs intentions et la réalité. On rit parfois, on sourit souvent, mais surtout, on ressent — et cela suffit à rendre la lecture inoubliable. Il y a quelque chose dans ce roman qui me dit qu’il ferait un très bon « film français », bien ancré dans son genre, au casting aussi éclectique d’atypique.

Le seul petit hic à mon goût ? La couverture, qui ne rend vraiment pas hommage à ce roman et m’a fait d’abord penser à un genre de roman animalier pour ados/jeunes adultes plein de rebondissements et d’aventures, avec un peu de frissons. Il n’en est rien ! Quelque chose de plus doux, de plus adulte, m’aurait davantage projetée dans ce récit plus profond qu’il n’y paraît.

Pour conclure, ce livre s’adresse à tous ceux qui aiment les histoires simples mais profondes, portées par des personnages ordinaires aux vies pleines de failles, bien ancrée en France. Ceux qui apprécient les romans où l’humour flirte avec la tristesse, où chaque chapitre semble éclairer un coin d’ombre de notre propre humanité. « Dognapping » est une œuvre discrète, mais précieuse. Une lecture que je recommande sans hésiter, pour ce qu’elle dit de nous, de nos fragilités, et de ce qui nous relie les uns aux autres, même dans les instants les plus improbables.

Je tiens à remercier les feues éditions Blackléphant pour leur confiance et leur envoi.

Les éditions semblent être en liquidation judiciaire, alors que j'ai reçu une sélection de livres il y a à peine 1 mois. Ce sont les auteurs que j'ai chroniqués qui m'en ont informée. Je me suis engagée à lire et chroniquer cette sélection, mais mon partenariat prendra fin avec cette dernière lecture.